Pierre Caron est directeur adjoint aux finances et contrôleur des finances à LOJIQ. Dans le cadre de la situation liée à la Covid-19, Pierre et une dizaine d’autres membres de l’équipe LOJIQ ont suivi la situation au quotidien, parfois jour et nuit. Voici le témoignage d’un membre de l’équipe LOJIQ qui incarne notamment l’accompagnement et le soutien offerts par LOJIQ pour faire face aux situations d’urgences vécues par près de 1 000 participants dans 60 pays depuis plus d’un mois.

La situation liée à la Covid-19 ne date pas de la mi-mars. Depuis quand travailles-tu sur le sujet ?

Effectivement, dès la mi-janvier 2020, j’ai été invité à participer à la cellule de crise du ministère des Relations internationales et de la francophonie (LOJIQ étant un organisme qui relève de la ministre du MRIF) et de ses délégations à l’étranger.

Au début, cette cellule comprenait une douzaine de personnes. Début mars, près de 70 personnes de tout l’appareil gouvernemental prenaient part aux réunions, incluant des représentants du ministère de la Santé et des Services sociaux, ainsi que des chefs de poste de pays comme l’Italie et la France.

On a discuté des 1ers cas en Chine, de la fermeture des bureaux du Québec, des consulats et ambassades en Asie. Nous avons ensuite suivi l’évolution vers la Corée du Sud et le Japon, étant donné que des participants aux programmes de LOJIQ se trouvaient dans chacun de ces pays. Le 31 janvier, un courriel a été envoyé à 1 000 de nos participants pour les aviser de l’annulation des vols en Asie et des difficultés à prévoir pour la modification et l’achat de nouveaux billets. Les 1res mesures de quarantaine se mettaient en place, ainsi que la fermeture de ces frontières.

Début mars, le cœur de la situation avait atteint l’Europe. Le 5 mars, nous avons contacté nos participants en Italie pour les inciter à rentrer au Québec. Le lendemain, nous avons pris la décision de « fermer » 6 pays : Chine, Corée du Sud, Japon, Italie, Inde et Maroc.

Y avait-il beaucoup de participants aux programmes de LOJIQ à l’international le 13 mars, lorsque le premier ministre a invité les Québécois à revenir ?

Le 13 mars, nous avions 965 participants dans 60 pays. Ce qui nous inquiétait beaucoup également, c’était les 335 participants qui devaient quitter dans les prochains jours pour l’étranger. Nous devions les convaincre de rester au Québec bien que les avis aux voyageurs d’Affaires Mondiales Canada ne faisaient pas encore état du risque de voyager. Cela fait beaucoup de jeunes à contacter, retracer, soutenir et aiguiller. Nous sommes fiers d’avoir pu être réactifs et efficaces dans nos démarches, et ce dès que possible.

Comment la décision a-t-elle été prise d’accompagner les participants dans leur retour ?

Le portrait général que nous avions démontrait clairement que ce n’était qu’une question de temps avant la fermeture de nombreuses frontières. Nous ne souhaitions pas laisser nos jeunes adultes dépourvus d’aide ou de ressources pour les accompagner dans cette crise extraordinaire. LOJIQ a un devoir auprès de ses participants et il nous apparaissait absolument essentiel d’être présents pour eux et très proactifs.

Il faut savoir que les participants achètent eux-mêmes leurs billets d’avions. Nous ne pouvions donc pas agir à leur place auprès des compagnies. Nous leur avons donné la consigne de modifier leurs billets. Nous les soutenions à hauteur de 300 $ pour couvrir les frais de changement. En cas d’impossibilité de modification, nous prenions en charge 50% du prix du billet.

Pour l’anecdote, une participante en Espagne a vu son vol annulé une fois arrivée au comptoir d’enregistrement. On lui a dit qu’il fallait débourser 10 000 $ pour continuer, un prix totalement exorbitant. Nous avons finalement travaillé avec elle pour réussir à lui trouver un billet le lendemain à un prix raisonnable, malgré les 4 escales à effectuer…

Quel a été ton rôle exactement? À quelles difficultés as-tu eu à faire face, comment as-tu solutionné ces problèmes ?

Je tiens à souligner que c’est avant tout un travail d’équipe. Je tiens d’ailleurs à remercier tous mes collègues pour leur dévouement ainsi que le MRIF pour sa précieuse collaboration!

En tant que directeur adjoint aux finances, je peux effectuer des dépenses et en autoriser. La décision d’intervenir a été prise un vendredi 13 mars. Il fallait agir vite. Nous sommes donc rentrés au bureau le samedi et le dimanche afin d’être disponibles malgré le décalage horaire de 6 à 12h avec nos participants, ces derniers se trouvant essentiellement en Europe ou en Asie. Nous avons monté notre cellule de crise interne à la suite de l’envoi de courriels à nos participants le 13 mars. Nous étions 4 collègues au début de la fin de semaine, mais on s’est vite rendu à 12 personnes mobilisées. Sur une base volontaire, l’équipe s’est renforcée! On s’était fixé comme objectif de répondre aux courriels dans un délai de 3h maximum. On s’est mobilisés quasiment 24/24h, étant donné que les frontières fermaient les unes après les autres. En parallèle, les compagnies aériennes annonçaient leurs annulations. Il ne fallait donc pas perdre de temps.

Une autre partie de notre accompagnement a consisté à soutenir ceux qui n’avaient pas de logement disponible au Québec ou de possibilité de s’isoler lors du retour. Nous avons tenté de les aider dans l’aspect « quarantaine », une collègue à moi pourra vous en dire plus à ce sujet.

Quelles sont les principales difficultés auxquelles les participants étaient confrontés ?

Pour nos participants, les principaux enjeux étaient l’impossibilité de rejoindre les compagnies aériennes pour modifier les billets d’avion ainsi que les fermetures rapides des frontières. Dans tout ce chaos et ces changements rapides et incessants, il fallait rester sur le qui-vive et suivre la situation de près afin de revenir rapidement au pays. La demande était importante et c’était une course contre la montre.

Depuis un mois, combien de participants ont été accompagnés par LOJIQ dans leur retour ?

Ce sont 855 participants qui ont pu rentrer et 110 qui ont fait le choix de rester à l’étranger pour terminer leurs sessions d’études. Nous restons en lien étroit avec les participants qui sont toujours outremer. Nous sommes là pour eux.

Est-ce la première crise du genre à laquelle LOJIQ doit faire face ?

On a vécu d’autres crises, mais jamais d’une telle ampleur! Je me souviens par exemple du 11 septembre 2001. Nous avions 60 participants lors de l’évènement Québec/New-York 2001. Des activités étaient organisées dans ce cadre au pied des tours jumelles…

Les récentes attaques terroristes en France notamment font également partie des situations intenses que nous avons eu à gérer.

Heureusement, nous sommes bien préparés. LOJIQ, en collaboration avec le MRIF, effectue des suivis très rapprochés lors de diverses situations d’urgence (catastrophes climatiques, terrorisme, etc.). Nous avons des procédures pour informer nos participants, leur offrir des ressources et les accompagner si nécessaire. Nous communiquons activement avec nos participants quand des situations critiques surviennent, on veut s’assurer de leur santé et sécurité, comme des bons parents! 

Les participants sont-ils reconnaissants de l’aide qui leur a été offerte ?

Nous avons eu plusieurs témoignages de remerciements que j’ai partagé avec mes collègues et aussi la cellule de crise du MRIF. Mon rôle était d’informer le ministère des cas les plus critiques. Ils pouvaient ainsi prendre les mesures nécessaires à leur niveau. C’était tout un travail d’équipe!

Comment as-tu vécu cette expérience?

Au niveau professionnel : une expérience comme celle-ci ne se vit pas de manière personnelle, mais en équipe! Nous avons vécu d’autres situations difficiles mais jamais je n’aurais imaginé une situation impliquant tous nos participants. Tous les collègues qui se sont relayés ont permis à LOJIQ d’apporter le soutien nécessaire aux jeunes du Québec. Notre équipe en ressort plus soudée!

Au niveau personnel : je n’ai pas dormi beaucoup en mars…  J’ai 2 enfants de l’âge de nos participants. Par moment, j’avais l’impression d’en avoir 965! Je suivais certains vols de rapatriement avec l’application « Flightradar24 » la nuit tout en répondant à de nombreux courriels. Il m’est même arrivé de procéder à l’achat de billets à 3 h du matin pour faire face à des changements d’itinéraires de dernière minute!C’est toute une expérience et comme on le dit toujours, à travers cette crise, il y a aussi eu de belles opportunités de croissances et d’apprentissages. On en ressort tous grandis et on en a tiré de belles leçons pour être encore plus efficaces pour l’avenir.

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